09 août > 14 septembre
fermé les mardis et mercredis
Cette exposition présente trois séries de photographies issues de trois résidences d’artistes – Occitanie, Catalogne, Baléares – qui nous invitent à (re)penser le lien entre Pyrénées et Méditerranée, en interrogeant le voisinage des sommets et de la mer dans une conjugaison de temps.
S’ouvre alors un dialogue entre les éléments bruts, primitifs et telluriques du Cap Creus capturés par Cloé Harent, la temporalité très ciblée des archives photographiques de Majorque revisitées par Marina Planas et l’approche à hauteur d’homme des communautés villageoises des vallées des gaves adoptée par Judith Prat.
Cette interprétation actualisée du paysage devient ici source de créativité et de réminiscence des valeurs sensibles permettant de mieux penser les enjeux du présent par-delà les images stéréotypées et marchandes qui nous empêchent souvent de le comprendre.
La photographie pyrénéenne, au XIXe siècle, restitue les explorations menées par des « découvreurs ». Enrichie de correspondances et de dessins, elle constitue une base historique pour aborder les mutations complexes des Pyrénées. Mais, à ce travail de fondation des imaginaires, il manquait la rencontre de la société pyrénéenne, ses connaissances intimes et vécues des espaces et de la langue gasconne des Pyrénées, fabrique de toponymie, art de l’imaginaire…
Le travail photographique de Judith Prat accueille les regards de celles et ceux qui y vivent, sensible à ce territoire si singulier par sa contribution aux sujets de société (la place des femmes, les estives comme bien commun, l’accueil des exilés …), à ce territoire des parentés qui lient les humains, la nature, les paysages. Le « bucolique » n’est pas le sujet ! Leurs paroles questionnent l’avenir des Pyrénées : quels chemins débroussailler ?
Cette montagne n’est pas immuable ; elle est aujourd’hui très impactée par l’aggravation de la crise climatique. Pour agir, il faut changer d’imaginaire pour que les Pyrénées demeurent un territoire poïétique où le travail photographique serait une source majeure de notre prise de conscience du réel et de sa fragilité.
Anne-Guite Beau-Castagnac
La photographe Cloé Harent s’est immergée dans les paysages sauvages du Cap de Creus à Cadaqués, territoire protégé où roche, vent, soleil, mer et sel dialoguent depuis des millénaires. Dans cet univers âpre et piquant, elle révèle ce qui perdure et résiste au temps.
In Memoriam Terrae est une série qui, dans un espace-temps fictionnel, rend hommage à une planète Terre encore brute et primitive, sans trace humaine.
Son travail explore la mémoire inscrite sur la roche, elle compose une vision du Cap de Creus comme un lieu traversé par des forces archaïques.
En approchant la matière aux textures abrasives, Cloé Harent brouille les repères et ouvre un espace où réel et fiction se mêlent. Son regard, proche de l’archéologie, s’appuie sur une intuition poétique. Il ne s’agit pas de ressusciter un passé précis, mais d’inventer librement un récit où les strates mémorielles se superposent.
À une époque où il devient rare de trouver des lieux dépourvus de traces humaines, Cloé Harent tente de nous y plonger, le temps d’un voyage.
La carte postale, fétiche du passé, est envisagée ici comme un outil spéculatif. Non pas comme une image nostalgique, mais comme un point de départ pour imaginer d’autres futurs possibles. Les cartes postales peuvent devenir des outils de critique et de création si elles délaissent leur fonction commerciale pour des usages communautaires, pédagogiques et poétiques.
Dans le cadre de cette mission photographique promue par l’Eurorégion Pyrénées-Méditerranée, nous proposons un travail basé sur l’interprétation collective de cartes postales issues des archives : des actions intégrant des essais, des pratiques artistiques, des audiodescriptions ou des cartographies numériques pour activer de nouvelles formes de relation entre image, paysage et territoire.
Depuis l’Observatoire COSTA, nous proposons une pédagogie critique du paysage qui déconstruit l’imaginaire touristique hérité et favorise des processus de réappropriation symbolique du territoire. Cette pédagogie ne repose pas sur la présentation d’images « authentiques », mais sur l’accompagnement des habitants du territoire eux-mêmes – à travers leurs multiples voix – pour construire leurs propres récits visuels, réécrire les archives et générer des représentations plus justes, diverses, complexes et sensibles.
La carte postale, dans ce contexte, devient un nouveau paysage entre mémoire et imaginaire du futur.
Diplômée en droit et spécialisée dans les droits de l’homme, Judith Prat s’est ensuite formée à la photographie et a décidé de la poursuivre professionnellement. Elle a travaillé en Amérique latine, au Moyen-Orient et en Afrique, documentant des questions liées aux droits de l’homme, au territoire et à la mémoire collective, avec une attention particulière pour la situation des femmes.
Dans ses derniers projets, elle se penche sur les processus de recherche qui précèdent l’acte photographique et explore des récits visuels qui établissent un lien entre les images et la pensée critique, car elle est convaincue que c’est grâce à cette relation que la photographie a le pouvoir de transformer la sensibilité individuelle ainsi que la conscience collective.
Son travail lui a valu de nombreuses récompenses, notamment le prix Imagen de la Société géographique espagnole (2023), la Sabina de Plata pour sa carrière professionnelle (2021) et le prix de photographie Artes & Letras (2017). Elle a été sélectionnée pour le New York Times Portfolio Review et a reçu la bourse de recherche Leonardo de la Fondation BBVA en communication, ainsi que la bourse du séminaire de photographie Albarracín. Ses projets ont également été reconnus et récompensés dans des festivals et concours internationaux tels que le Prix de la Photographie Paris, le Julia Margaret Cameron Award (Royaume-Uni), le Photofest Award (Mexique) et les International Photography Awards (États-Unis). Elle a été nominée pour les Gabriel García Márquez Awards et pour le 6×6 Global Talent Programme de World Press Photo.
Ces dernières années, elle a organisé plus d’une centaine d’expositions. Son travail photographique a été présenté en Espagne dans des institutions telles que le Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, le Círculo de Bellas Artes et PhotoESPAÑA, ainsi que dans des villes du monde entier, notamment Bogota, Paris, Moscou, Avignon, Montréal, Québec et Querétaro. Elle a également participé à de grands événements internationaux tels que le Forum social mondial (2021) et la Biennale de La Havane (2024).
Son travail a été présenté dans des médias tels que le New York Times, Al Jazeera et The Guardian. Elle a publié deux livres de photos : MATRIA et BRUJAS (présentés en 2025). En tant que documentariste, elle a réalisé les courts métrages You, sit down ! et They said she was a witch.
Elle donne également des conférences et des masterclasses sur son travail dans des universités, des organisations culturelles et des institutions, et fait régulièrement partie du jury de concours et de festivals internationaux de photographie.
Photographe française née en 1998, Cloé Harent rejoint l’école de l’ETPA à Toulouse en 2017. Elle en sort diplômée fin 2019, avec une mention Prix Spécial du jury, avant d’intégrer la résidence 1+2 Factory, qui marque ses premiers pas dans le format résidence.
Depuis 2018, guidée par un attachement profond à la terre et au vivant, elle développe une approche sensible et engagée à travers sa série Le lien de la terre. Ce travail, construit au fil de rencontres sur l’ensemble du territoire français, documente des pratiques paysannes en quête d’autosuffisance. En 2021, le projet est récompensé par le Prix ISEM Jeune Photographe.
Finalisée en 2023 dans le cadre du mentorat de l’Agence VU’ et du Fonds Régnier pour la création, la série fait l’objet d’une exposition à la Galerie VU’. En 2024, elle est également présentée au Festival Le champ des Impossibles, projetée aux Boutographies, et publiée dans le portfolio de la revue EPIC.
La même année, elle initie une nouvelle série, Bruit rose, lors de la résidence Tremplin Jeunes Talents du Festival Planches Contact à Deauville. Ce travail, tourné vers la mer, explore la texture sensorielle d’une biodiversité fragile sur les estrans normands. La série remporte le Prix Tremplin Jeunes Talents.
En 2025, elle est invitée en résidence à la Maison de la Photographie des Landes pour un projet consacré à la jeunesse et aux formes de transmission dans le monde de l’apprentissage en entreprise. À travers ce travail, elle met en lumière une autre vision de l’école, ancrée dans des territoires ruraux, et interroge les difficultés rencontrées par certains jeunes à trouver leur place dans les parcours éducatifs classiques.
Puis elle poursuit son travail de recherche visuelle au Cap de Creus dans le cadre du Festival InCadaqués. De cette immersion naît In Memoriam Terrae, une série qui interroge la roche et la mémoire d’un lieu, dans un temps suspendu, dénué de toute présence humaine.
Le travail de Marina Planas tourne autour des frontières entre l’art et la vie, la réalité et la représentation visuelle, la fiction et la mémoire. Elle mène actuellement des projets sur les questions liées aux archives. Ces dernières années, son travail s’est concentré sur les cartes postales et sur l’idée de générer fiction et désir par le biais de l’utopie touristique.
En tant que directrice du Centre de création et de recherche contemporaine Casa Planas, elle a lancé le Art Investigation Programme, qui se concentre sur la création contemporaine par le biais de résidences. L’objectif est d’activer les archives Planas et d’encourager la création par le biais de sa pratique artistique. Dans le cadre de ce programme, elle a collaboré avec des artistes tels que Joan Fontcuberta, Antoni Muntadas, Dora García et Pedro G.Romero.
Marina Planas est titulaire d’une maîtrise en photographie, vidéo et médias connexes de la School of Visual Arts de New York et d’une licence en communication audiovisuelle de l’université Ramon Llull de Barcelone. Ses installations, vidéos et photographies ont été présentées à l’Anthology Film Archive (Nyc), dans le contexte de la Biennale de Venise, au Centre d’Arts Santa Mónica (Bcn), au FRAC-Corse (France), au Museu es Baluard (Palma), Just Mad (Madrid), Reina Sofia Library, Longueuil Biennale (Montréal), Galeria Mama (Rotterdam), Cortona on the move, International Photo Festival (Italie), parmi d’autres.
Elle a obtenu des bourses d’investigation artistique des gouvernements des îles Baléares, du Canada et du Royaume-Uni, ainsi que la bourse Pilar Juncosa i Sotheby’s pour une résidence à la Slade School of Arts de Londres. Son travail a été commandé par une variété d’institutions artistiques nationales et internationales.
Bénéficiaire de la bourse Alice Beck-Odette, , elle s’est inscrite en master (Photographie, Video & Related Media) à la School of Visual Arts de New York, où elle a également travaillé en tant que photographe et assistante technique vidéo au département des beaux-arts. Elle est titulaire d’un diplôme en communication visuelle.
Après avoir vécu à Barcelone et à New York, elle s’est installée à Palma, où elle vit actuellement. En 2019, elle a été vice-présidente de l’association des artistes visuels des îles Baléares.